La Borie de Savanac

, par Mireille Lancelin

BORIE DE SAVANAC
http://patrimoines.midipyrenees.fr/fileadmin//DOC_LIE/IVD46/IA46ETUD/IA46100687_01.PDF
La borie de Savanac : vue générale depuis la cour

Erigée aux 13e et 14e siècles sur une terrasse dominant le cours du Lot, la borie de Savanac est l’un des plus beaux exemples des riches demeures campagnardes de la grande bourgeoisie quercynoise au Moyen Age.
La borie de Savanac est un véritable "palais" de type urbain, bâti aux champs sur la rive droite du Lot en amont de Cahors. Construite à la fin du 13e siècle par les Sabazac puis agrandi au début du 14e siècle par les de Jean, elle est la représentation de la bourgeoisie locale enrichie par le négoce.
Ce fut au Moyen Age non seulement un lieu de villégiature pour ses propriétaires, mais aussi le centre d’une importante exploitation agricole, source de revenus, comme le furent les bories de Lamagdelaine, Réganhac et Mondiès établies dans les environs immédiats.
Le grand quadrilatère, composé de trois corps de bâtiment et d’une tour, s’organise autour d’une grande cour intérieure.
Un premier bâtiment rectangulaire fut l’objet de plusieurs phases de travaux qui s’échelonnèrent de la seconde moitié du 13e siècle jusqu’aux années 1315-1320. L’actuelle aile nord, correspondant à l’édifice primitif, constituait alors à elle seule la borie des Sabazac, avec la salle signalée par des fenêtres géminées.
L’intervention de Sicard de Jean, peu après 1314, fit de cette demeure de campagne un palais qu’il dota d’une tour en pierre, d’un vaste logis et d’une aile secondaire servant de dépendances. 
Ce "logis neuf" constitue, avec le palais Duèze à Cahors construit vers 1308, un important jalon dans l’architecture civile quercynoise de prestige. Au premier étage, le traitement de la grande salle remarquable par ses croisées à remplages garnis de quadrilobes appartient en effet à un vocabulaire novateur pour le début du 14e siècle.

 Le contexte historique
fortalicia de Savanac à Sicard de Jean. C’est à ce grand bourgeois habitant de Cahors, nommé chevalier en 1334, que revint l’agrandissement de la demeure initialement édifiée par les Sabazac dans les dernières années du 13e siècle. Plus d’un siècle plus tard, l’édifice et le domaine qui l’entourait étaient passés, sans qu’on en connaisse les détails, dans les biens du collège Pèlegry de Cahors.

 La borie et ses différents états
Formant un grand quadrilatère placé sur un léger promontoire surplombant le Lot, le borie est entourée par un ensemble de constructions des 18e et 19e siècle édifiées peu à peu autour d’elle.
Les corps de bâtiments qui la composent couvrent une surface bâtie de 387 m2 s’ordonnant autour d’une vaste cour intérieure. 
Deux bâtiments liés par une tour d’angle de plan massé ferment les côtés nord et ouest de la cour, tandis qu’une petite construction de briques évoque une autre aile partiellement conservée au Sud.

 L’aile nord (seconde moitié du 13e siècle)
L’aile nord bâtie en briques renferme une habitation primitive (de la seconde moitié du 13e siècle) à pignons à redents et armée d’une archère prévue pour sa défense. Cette construction fut agrandie vers l’Est à la fin du 13e siècle pour former une vaste demeure de plan rectangulaire. La grande salle (l’aula) était située au premier étage où sont conservées les traces d’une cheminée ainsi que des fenêtres géminées dont les fines colonnettes sont sommées de chapiteaux ornés de feuilles.

 Les travaux d’agrandissement (14e siècle)
Autour de 1315-1320, Sicard de Jean débutait l’agrandissement de la borie qu’il avait acquise en 1314. Le programme architectural fut alors calqué sur ceux qui avait régi les grandes demeures urbaines tel que le palais Duèze édifié dans la partie haute de la ville de Cahors à partir de 1308.
On édifia contre le flanc occidental de l’ancienne demeure une tour en pierre de plan rectangulaire contiguë à un nouveau logis axé Nord-Sud, le "logis neuf". Pour clore le programme, une aile communiquant avec le corps de bâtiment précédent fut établie au Sud de la cour.
 Le plan en U était ainsi formé et l’on peut penser qu’il y avait à l’Est une muraille percée d’une porte fermant le périmètre de la cour.

 La tour
La tour qui communique directement avec l’aile nord et le "logis neuf" englobe sur son flanc sud les traces d’une porte extérieure fortifiée. 
Elle comprend 3 niveaux. Le premier était faiblement éclairé par des jours réduits à des fentes et privé d’équipements domestiques. Le second était en revanche pourvu de latrines, d’un placard, et d’une cheminée, qui laissent envisager ici l’emplacement d’une cuisine ou d’une chambre, directement liées à la grande salle du "logis neuf".
La pièce qui s’étend au-dessus était largement éclairée par deux fenêtres géminées (de tradition romane) installées au Nord et à l’Ouest. Une petite cheminée, similaire dans la forme à celle de l’aula) ainsi que les latrines placées en encorbellement à l’angle nord-est pourraient restituer la place d’une chambre.

 Le "logis neuf"
C’est une construction imposante de 120 m2 de surface au sol s’élevant sur deux niveaux : un rez- de-chaussée accessible depuis la cour intérieure et destiné à la remise de matériel ; un étage placé sous charpente réservé à la grande salle, desservi par un escalier hors œuvre à deux volées dont il ne reste que de maigres vestiges.
La pierre calcaire, parfaitement taillée et assisée, apparaît comme un matériau de prestige, réservée essentiellement aux parties directement visibles de l’extérieur. Côté cour, on a donc préféré la brique, sans doute moins onéreuse.
La salle, chauffée par une grande cheminée en arc segmentaire et fermée par des volets de bois, était éclairée par des fenêtres à remplage placées à l’Ouest, par un grand oculus à quintefeuille et par deux croisées ouvertes au Sud dans le mur pignon couronné de redents. Ces dernières, taillées dans le grès, sont ornées dans leur partie haute de remplages composés de deux quadrilobes, selon un dessin que l’on retrouve au palais Duèze à Cahors ou encore au palais de la Raymondie à Martel.

 L’aile sud.
L’aile qui se développait à partir du "logis neuf" sur le côté sud de la cour est très altérée. 
Fermant à l’origine la cour au Sud, elle est aujourd’hui réduite à un petit bâtiment en brique indépendant de l’ensemble, et pourvu seulement d’un petit jour en meurtrière.

La borie de Savanac : vestiges de latrines sur le côté nord-est de la tour