Ô BELLE NUIT !...
O nuit, ô belle nuit de l’admirable été !
Sous le voile éternel que le soir t’a jeté
Comme un manteau royal dont les revers scintillent,
Ma tète se relève et mes yeux se dessillent...
Bien mieux qu’à la lumière éclatante du jour,
Je sens la vanité de chercher le contour
D’un Univers où tout : regard, rêve et pensée,
Meurt désespérément sur la lande glacée
Qui commence partout, ne finit nulle part,
D’où toujours l’on arrive et d’où sans fin l’on part...
Je t’aime, ô belle nuit, nuit si longue ou si brève,
Comme on aime son corps, ou son âme ou son rêve !
Comme on aime une femme, une fleur, un enfant,
Ou quelque souvenir dont le jour vous défend !...
Je t’aime pour la paix qu’à la terre tu donnes ;
Pour tout ce qu’à ton seuil les méchants abandonnent ;
Pour ce qui s’élabore en ton sein de beauté,
De sèves, de remords, d’amour et de bonté !...
Je t’aime pour l’étrange et grave destinée
Qui veut que le soleil, dans sa course ordonnée,
Pendant qu’il s’en ira dans l’éther faire un tour,
Fasse de toi la mère et la fille du jour...
(Inédit).
photo : le triangle noir
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