L’abreuvoir - Emmanuel AERGETER

, par Marc Lagaly

L’abreuvoir

Au ras des causses gris s’amincit le soir rouge...
Des chênes, un bouquet de pins noirs ; rien ne bouge,
C’est l’heure où les grands boeufs fatigués des labours
Viennent, lourds et puissants, à la chute des jours,
Vers l’étang solitaire et grossi par l’orage
Incliner leurs fronts roux couronnés de feuillage...
Ils arrivent avec lenteur des chemins creux,
Conduits par un enfant qui siffle devant eux
Et parfois, les touchant de l’aiguillon sauvage,
Guide leur magnifique et conscient servage
Ils viennent à la file au bord de l’abreuvoir,
Et, quand le fin croissant tremble dans son miroir,
Ils mugissent, le cou tendu vers cette eau fraîche,
Se demandant quel boeuf, broutant loin de sa crèche
Le pré glauque et mouvant qui dans la source dort,
Vers leur mufle marbré lève ses cornes d’or...

Emmanuel AEGERTER

Poèmes : Images du Pays